Tonnerre sous les tropiques

Film : Tonnerre sous les tropiques (2008)

Réalisateur : Ben Stiller

Acteurs : Ben Stiller (Tugg Speedman), Jack Black (Jeff Portnoy), Robert Downey Jr. (Kirk Lazarus), Brandon Jackson (Alpa Chino)… (Durée 1h48).

Durée : 01:48:00



Célèbre pour ses comédies loufoques et son statut de star du comique outre-atlantique, l’acteur-réalisateur-producteur Ben Stiller signe avec Tonnerre sous les tropiques sa ré alisation la plus ambitieuse. Le film est l’achèvement d’un projet né en 1987, sur le tournage du film de Steven Spielberg, L’empire du Soleil. A l’époque, les acteurs de films de guerre participaient à des stages d’ « aguerrissement » avant le tournage. Amusé par les discours vaniteux qu’ils ne manquaient pas de tenir à propos de l’expérience « unique » que ces acteurs avaient alors vécu, Ben Stiller a vu là une occasion de rire et faire rire, dont Tonnerre sous les tropiques est l’aboutissement.

L’acteur-réalisateur a procédé en suivant deux fils conducteurs : les lieux communs laissés par les véritables films de guerre et une satire facétieuse de l’industrie hollywoodienne. Le film commence donc « comme une fresque guerrière avant de virer à la comédie… », dixit l’ acteur Steve Coogan (Damien Cockburn)*. A noter les fausses bandes-annonces mettant en scène les protagonistes de Tonnerre sous les tropiques en plein exercice de leur art… La première demi-heure est d’anthologie, donnant le ton de l’œuvre dans un feu d’artifice d’effets spéciaux et d’humour facile mais efficace.

Le film oscille entre réalisme et comédie. Montrant l’envers du décor, du point de vue de la réalisation et du jeu des acteurs, Ben Stiller fait œuvre de pédagogie autant qu’il déchaine les rires… Car si les méthodes dévoilées sont réelles, leur mise en œuvre relève d’un comique de situation ubuesque. Véritable comédie humaine, le film entraîne dans son sillage de nombreuses guest-stars, dont les apparitions ou les seconds rôles ne sont pas pour rien dans le succès de cette m& eacute;ga-comédie autour du tout-Hollywood. Se succèdent Matthew McConaughey, Nick Nolte et, cerise sur le gâteau, un Tom Cruise méconnaissable et fantastique en producteur mégalo et accro au Coca.

Les gags s’enchainent à un rythme effréné et restent malheureusement dans le registre du premier degré bien que souvent extrêmement drôle. L’humour se fait un brin plus fin quand il sert de levier à une satire de l’industrie cinématographique américaine, à grand renfort de clins d’œil et de relecture des classiques du genre (Platoon, Hamburger Hill,…). Le talent des acteurs est ironiquement montré comme un tremplin vers l’Oscar, ainsi que le souligne une conversation entre Speedman et Lazarus (il ne faut pas interpréter un débile mental sans lui accorder une compétence extraordinaire –comme Rain Man ou Forrest gump- à moins de détourner le public et de saborder son film…). De même les méthodes d’immersion dans un personnage, chères aux promoteurs de l’Actors Studio, sont tournées en ridicule quand Kirk Lazarus, la star du cinéma d’art et d’essai et des rôles exigeants, décide de subir une modification de sa morphologie afin d’interpréter un sergent noir pendant la guerre du Vietnam…
Toutefois cette comédie trouve ses limites en ce qu’elle tire partie des méthodes mêmes qu’elle tourne en dérision. Effets spéciaux démesurés, script et happy-end convenu, réalisation poussive notamment lors des scènes d’action… Tout cela concourt à laisser l’impression de visionner un blockbuster typique, ce que l’humour de Ben Stiller ne parvient pas tout à fait à dissiper…

SI Ben Stiller est connu pour ses comédies, ces dernières sont réputées pour leur comique premier degré et parfois outrancier. Tonnerre sous les tropiques ne déroge pas à cette marque de fabrique. L’humour est largement issu d’un comique de situation lourd, tandis que les dialogues sont d’une grande vulgarité. Ainsi les genres de prédilection des stars du faux-film sont au mieux divertissants (les films d’action de la saga Le rôtisseur…), au pire abrutissants (la famille pétomane de Jeff Portnoy).
A trop vouloir faire rire, le réalisateur tombe dans les clichés les plus extrêmes, voire les plus injurieux, comme l’illustre une fausse bande annonce particulièrement dérangeante et irrespectueuse (traitant d’une histoire d’amour dans un monastère).
L’artillerie lourde déployée par Ben Stiller se révè le donc drôle mais à prendre avec des pincettes, car on ne peut rire de tout…


Stéphane JOURDAIN

* in notes de production