Café Society

Film : Café Society (2016)

Réalisateur : Woody Allen

Acteurs : Jesse Eisenberg (Bobby), Kristen Stewart (Vonnie), Steve Carell (Phil), Blake Lively (Veronica)

Durée : 01:36:00


Woody Allen n’en finit plus de réaliser des films, en moyenne un par an depuis 1966, son 54ème aujourd’hui. Entouré d’une formidable équipe technique de repéreurs, costumiers, cadreurs, décorateurs… le réalisateur new-yorkais a l’habitude de tourner vite et bien, avec facilité, en laissant une grande liberté à ses acteurs, triés sur le volet au casting et sensés connaître leur texte sur le bout des doigts à la première prise.

Pour son premier film tourné en numérique, Woody Allen raconte l’histoire du petit monde grouillant du spectacle, naviguant entre Broadway et Hollywood dans les années 1930. Epoque où Los Angeles incarne déjà le désir de liberté, de romance sans limite et d’enrichissement, loin du monde politique, financier et moralisateur des grandes villes de l’Est gangrénées par la pègre (Chicago, New York). Le premier mérite du film est de mettre en scène rapidement un grand nombre de personnages atypiques représentant toutes les tendances de l’époque, qualité que Woody Allen partage avec Martin Scorcese. Cette mise en ambiance est précieusement accompagnée par une légère musique de jazz quasiment permanente, dont lui seul a le secret. Virevoltant d’une conversation à l’autre, endossant lui-même le rôle de voix-off, Allen recrée l’atmosphère animée de la société bruyante des années 30. Il remet au goût du jour des comportements légers et décalés que l’on n’a pas l’habitude de voir, notamment dans les relations amoureuses.

Une romance vintage dont Allen a le secret

Car il n’est bien sûr question que de cela avec Woody Allen. Bobby va rencontrer Vonnie (Kristen Stewart) mais rien ne sera finalement très simple. Car d’où vient Bobby ? Comme beaucoup de jeunes encore aujourd’hui, Bobby, remarquablement interprété par Jesse Eisenberg (The Social Network), n’a pas supporté l’étouffement du vieux New York et a rêvé de devenir acteur à Hollywood. Il a cru tenir le bon bout en se faisant pistonner par son oncle Phil, agent de stars, quitte à démarrer en simple coursier. Sauf que Vonnie a des dollars à la place des yeux…

Le film n’est pas tendre avec le monde des acteurs en général, théâtre et cinéma, qu’il montre superficiel, arriviste et bling bling, notamment parce que les studios d’Hollywood, à ce moment, encouragent de façon exagérée la démarcation de leurs stars par le chic. Si cela n’est pas une fatalité et si un élan de jeunesse fait jurer à Bobby et Vonnie qu’ils sont loin de se laisser broyer par la fabrique de stars et de rêver d’une villa pompeuse à Beverly Hills, le scénario montre bien de quelle façon il est aisé de se faire aspirer… et d’abandonner ses rêves. Il porte même une réflexion assez judicieuse sur les choix que la vie pousse à faire, sur lesquels il n’est pas toujours possible de revenir. Woody Allen s’intéresse ici à l’incertitude des relations. Il emploie à dessein une couleur dominante, le jaune, qui soutient esthétiquement la thématique du regret, de l’infidélité autant que de la richesse et de la prospérité. Jolie composition graphique, quoiqu’à la limite de la bavure, à cause de la technologie employée (caméra numérique). La seule chose à regretter, toujours la même chez Allen, demeure l’absence de réelle profondeur des personnages. Ils hésitent, dans des situations comiques qui les dépassent. Mais qui sont-ils ? Jusqu’où sont-ils capables d’aller ? A vous de l’imaginer ! Woody Allen ne mettra pas de point final de peur de sucrer son café…