Kung-Fu Panda 2

Film : Kung-Fu Panda 2 (2011)

Réalisateur : Jennifer Yuh Nelson

Acteurs : les voix de Jack Black et Manu Payet (Po), Angelina Jolie et Marie Gillain (Tigresse), Dustin Hoffman et Pierre Arditi (Shifu), Lucy Liu et Mylène Jampanor (Vipère), David Cross et Tomer Sisley (Grue...

Durée : 01:31:00


Des combats haletants au cœur d’une Chine ancestrale splendide aux valeurs traditionnelles. Loin d’être simpliste, le film aborde de nombreux thèmes, de la paternité à la quête d’identité. Petit bémol : on ne sort pas hilare.

Pour le deuxième épisode de la saga Kung-Fu Panda, les scénaristes Jonathan Aibel et Glenn Berger ont créé une intrigue bien étoffée. Ils ont su faire de cette œuvre un voyage au cœur d’un système de valeurs ancestral aux côtés d’un héros panda un peu ridicule!

Toutes les occasions sont bonnes pour aborder de nombreux thèmes assez hétéroclites. En effet les protagonistes de cette aventure pratiquent les arts martiaux chinois. En enrichissant cette toile de fond, les scénaristes ont déjà su aborder des sujets assez divers. Dans ce
nouvel épisode de la saga, le personnage principal de l’œuvre, Po, le panda maître de kung-fu, doit trouver la paix intérieure. Voilà une occasion rêvée pour montrer premièrement l’évolution d’un personnage qui travaille sur lui-même. Mais on en profite aussi pour traiter les sujets de l’identité et de l’adoption. C’est plutôt réussi !

« Le film est un conte moral qui parle des vraies valeurs et de nos rapports à nos amis, ce qui le rapproche d’un film d’animation classique. » (Angelina Jolie in Dossier de Presse). Ce tissu d’idées est donc encore enrichi par les valeurs véhiculées dans le film ; elles découlent de la pensée philosophique dont les arts martiaux sont imprégnés. Tout d’abord, le kung-fu est étroitement lié à une saine discipline du corps et de l’
esprit, acquise à force d’exercice et de persévérance dans le renoncement. De plus, on est surpris en constatant l’évolution de Po le panda. Il a déjà atteint le degré de maître en kung-fu, lui si gourmand et pataud, et il trouvera au cours du film la « paix intérieure ». Ce héros aux allures d’épicurien n’atteint pas une réelle profondeur. Mais si cette sérénité constitue une forme de bonheur assez superficielle, la réussite est considérée comme accessible à tous puisqu’elle est le fruit d’un effort personnel. L’équilibre est trouvé entre élitisme et nivellement par le bas. Voilà une finesse inattendue et bienvenue !

L’esprit d’équipe est aussi admirablement mis en valeur à travers les techniques de combat qui nécessitent plusieurs guerriers. Les noms français de ces figures sonnent un peu faux mais
dans la bande des cinq Cyclones et du Guerrier Dragon, chacun a son rôle en fonction de ses qualités : la mante et sa force surprenante sont aussi précieuses que la souplesse de la Vipère.
« Les relations qu’il (Po) entretient avec les Cinq Cyclones m’ont fait penser à une famille dysfonctionnelle traditionnelle» (Angelina Jolie in Dossier de Presse). On se complète, on pallie même aux faiblesses de l’autre, malheureusement surtout celles du héros. « N’importe quel scénariste se contenterait de travailler sur un seul de ces personnages : autant dire que les réunir tous les cinq, tout au long du film, était une opportunité géniale pour nous !» (Glenn Berger in Dossier de Presse)

Enfin, la trame du métrage repose sur la confrontation de deux
systèmes de valeurs, l’un traditionnel, séculaire et l’autre moderne, jeune, innovant. Confrontation intéressante où l’invention de l’arme à feu semble dépasser par sa puissance la sagesse du kung-fu. En dévastant la Chine par la violence de ses canons, le seigneur Shen, risque de détruire une civilisation, c’est bien ce que pense le sage Shifu :
« Ce pourrait être la fin du kung-fu ». Un peu dommage que le dénouement consiste en l’éradication de toute nouveauté, on reste un peu sur sa faim. Il semblerait qu’au fur et mesure de l’intrigue, cette confrontation qui a dessiné l’intrigue tombe un peu dans l’oubli. Il faut dire que ce n’est pas évident de traiter à fond tant de sujets ! Qui trop embrasse mal étreint ? A moins que cette issue nie la modernité en tant qu’héritage des temps anciens…

>Le film montre comment une chose peut être utilisée à bon ou mauvais escient  : prévue à l'origine pour faire des feux d'artifice, la poudre n'est envisagée par Chen que comme objet de destruction.

Mais revenons à des pensées plus réjouissantes : « L’humour de la saga est l’une des recettes de son succès, selon Seth Rogen qui reprend le rôle de la frêle, mais puissante, Mante : «On a envie de rire rien qu’en regardant les Cinq Cyclones ensemble». (Dossier de Presse). C’est vrai,mais ce panda maître de kung-fu manque de crédibilité. Alors qu'il devrait être concentré sur sa tâche, quitte à nous faire rire entre deux combats, il
affiche un côté dissipé et insouciant qui s'accorde bien mal avec la « paix intérieure » et la sagesse qu'il recherche ! Difficile donc de l'admirer et de le respecter.

Cependant, tout dans cette œuvre est présenté avec art, c’est incontestable ! «Toute la phase de fabrication du film prend deux ans et mobilise des centaines de techniciens», précise le scénariste et coproducteur Jonathan Aibel. «Ce qui ne nous a pris que quelques jours à écrire fait ensuite travailler des départements techniques entiers » (Dossier de Presse). Paysages splendides, perspectives qui portent le regard vers un horizon bien lointain pour un écran plat. Les décors et les costumes ont été étudiés dans les moindres détails et produisent un effet d’authenticité et d’
harmonie. Les combats, bien sûr, sont créatifs, dans le mélange de comique et de prouesse où le 3D relief crée des effets époustouflants dans ces sarabandes de sauts périlleux de toit en échafaudages ou dans ces chutes vertigineuses du haut des falaises ou des tours. Explosions et feux d’artifices n’ont presque rien à envier au nouvel an chinois tant par leur ampleur que par leur esthétique!

Peut-être le seigneur Shen et le monde qui lui est associé peuvent-ils être considérés comme les chefs-d’œuvre décoratifs du film. En effet, voilà un « méchant » dont la personnalité est complexe et le visuel l’exprime bien. Le paon, cet animal orgueilleux, qui rêve ici de domination est aussi un esthète. Sa silhouette fine, aristocratique, montre bien que sa naissance et son éducation le prédestinaient au trône.
Néanmoins, s’il est beau et donc attirant, les tons rouges et noirs du décor qui l’entoure et son « armada » de loups gris et bruns manifestent sa cruauté passionnée, tandis que sa belle lance à la lame ondulée finit en pointe menaçante.
« Un personnage qui soit plus redoutable par sa force intellectuelle et émotionnelle que sa force physique. C’est comme ça qu’on a imaginé le personnage du paon blanc, Seigneur Shen» (Dossier de Presse). Ce prince n’incarne pas le mal et nous épargne ainsi un manichéisme simpliste. C’est une personnalité fine qui a son histoire et qui choisit de s’orienter vers la pouvoir tyrannique, la violence et la cruauté.


Cécile Chavériat